dimanche 16 janvier 2011

Si le pouvoir était un serpent...

Si le pouvoir était un serpent, il serait une hydre de lerne, cette créature de la mythologie grecque se présentant sous la forme d'un serpent d'eau avec parfois un corps de chien possédant plusieurs têtes, dont une immortelle. Ses têtes se régénéraient doublement lorsqu'elles étaient tranchées, et l'haleine soufflée par les multiples gueules exhalait un poison radical, même durant le sommeil de l'animal.

En effet réduire le pouvoir sous lequel la Tunisie avait  vécu durant des décennies à un serpent dont il suffirait de trancher la tête (qui serait Ben Ali) pour qu'il soit mort pour toujours est raisonnement trop simpliste et peut mener à de graves conséquences.

Les têtes de l'hydre de lerne tunisienne sont nombreuses et pendant qu'on est occupé à en couper certaines, celles qu'on laissaient pour mortes repoussent. Parmi ces têtes, il y a les plus hauts dirigeants de l'Etat dans les dernières décennies, les cadres et sous-cadres du RCD (parti du pouvoir), des conservateurs et des corrompus qui se sont accomodé de l'ancien régime et qui ne voient pas ce qu'ils auraient à gagner avec un changement démocratique qui mettrait tous les citoyens sur un même pied d'égalité alors qu'ils avaient réussi à se maintenir au dessus de la majorité de la population.

Se dire que l'ancien régime est mort avec le départ et donc la mort politique de Ben Ali serait une erreur grave que -heureusement- une majorité du peuple est en train de réaliser, d'autant plus que Ben Ali pourrait bel et bien être immortelle de l'hydre de lerne tunisienne.

En effet, aujourd'hui le pouvoir (politique et donc absolu) est toujours entre les mains des mêmes personnes à Ben Ali près, et encore croyez-vous que parce qu'il est géographiquement lointain que l'ancien président est coupé du pouvoir?

Croyez-vous que Mebazza et Ghannouchi, compagnons de route historiques de Ben Ali, piliers du pouvoir répressif et sanguinaire depuis plus d'une décennie, sont déconnecté de Ben Ali? Les avez-vous condamner une seule fois, même à demi-mot le régime passé? Moi non et cela ne m'étonne pas, comment voulez-vous qu'ils se condamnent eux-mêmes?

Quel crédit donner ces deux responsables qui ont déclaré assumer les plus hautes charges de l'Etat dans l'intérêt de l'Etat (oui je l'ai dit et le redis, ils n'ont jamais invoqué l'intérêt du peuple, ce qui est symboliquement complètement différent), quel crédit donner à ces Mebazza et Ghannouchi alors qu'ils étaient complices de la répression des semaines dernières , complices de la fuite du président criminel Ben Ali, qu'ils auraient dû traîner devant une cour de justice indépendante au lieu de couvrir sa fuite par une mascarade en deux actes (acte 1 : article 56, acte 2 : article 57) avec une entracte animée par les milices et mercenaires de la sécurité présidentielle et du RCD?

Nous ne sommes pas sortis de l'auberge, il n'y a qu'à regarder la télévision nationale (TV7) pour réaliser que rien, absolument rien n'a changé. Pas un seul débat politique en 48 heures, juste des émissions où des citoyens parlent d'insécurité et qui pourraient bien faire partie de la même pièce que le pouvoir nous joue, mais ceci sera le sujet d'un prochain billet.

Pour en revenir à l'histoire de l'hydre de lerne,  dont l'haleine soufflée par les multiples gueules exhalait un poison dangereux, même durant le sommeil de l'animal et qui ravageait le bétail et saccageait les récoltes, Héraclès finit par la tuer, plusieurs récits différents racontent cet exploit, et la version que je préfère est la suivante:

"Débordé par les multiples régénérations céphaliques, Héraclès appela Iolaos, fils d'Iphiclès, à la rescousse. Sur l'ordre de son oncle, il enflamma quelques arbres et utilisa des brandons afin de cautériser les moignons de cou. Quant à la tête immortelle, elle fut tranchée et enterrée, encore sifflante, sous un rocher." (source wikipedia)

Restons vigilants car tout peut redevenir comme avant, même le président!

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